Il y a toujours eu un problème de crédibilité dans le monde de l’univers du graphisme. Comme si le design graphique était un loisir, au même titre que collectionner des timbres ou aller à la pêche. Mais, même si on prend beaucoup de plaisir au quotidien, le graphisme est (il faut le rappeler) une véritable discipline et un métier.
Et oui un métier ! Avec des personnes compétentes, éduquées, formées, passionnées aussi, qui conçoivent des chartes graphiques, des univers numériques, des identités visuelles et des publicités qui ont du sens et une véritable approche longuement conceptualisée en amont.
Seulement, voilà, je ne sais pas ce qui se passe dans la tête des institutions publiques en ce moment, mais je trouve que quelque chose ne tourne pas rond. En témoignent 2 histoires récentes qui même si elles ne sont pas identiques, posent la même problématique. Pourquoi les gouvernements ou institutions de l’État ne font-elles pas à appels à de vrais professionnels ? Syndrome que l’on pourrait traduire par : pourquoi faire appel à un boucher alors que j’ai ma voiture à réparer ?
La Fête du graphisme en France
La première histoire vient de France. L’origine du projet est louable; l’organisation d’une fête du graphisme. Belle initiative du Ministère de la Culture et de la Communication, n’est-ce pas ?
On s’attend donc à ce qu’une agence de communication ou bien un studio de design graphique soit mandaté pour créer une campagne visuelle forte, moderne et attirante. Résultat, on se retrouve avec une archive d’un dessin de Jean-Paul Goude, de 1981…. pour l’affiche et un site web conçu par une agence de photographes (??), réalisé à l’aide d’un thème WordPress disponible sur ThemeForest.
Finalement, si je résume bien le graphisme en France; on a rien créé de neuf depuis les années 80 et la conception web se limite à un thème impersonnel à 45$. Ok !
Pour vous faire votre propre idée, je vous invite à lire l’article de Geoffrey Dorne sur son blog graphism.fr, qui nous décrit particulièrement bien la situation de l’histoire.
Le 150e anniversaire de l’indépendance du Canada
Comme j’ai un pied de l’autre côté de l’Atlantique, je m’intéresse aussi en ce moment à une histoire qui fait beaucoup bruit au Canada. En 2017, le pays fêtera son 150e anniversaire de l’indépendance et pour célébrer ce fait historique, le gouvernement fédéral à commandité l’élaboration d’une identité visuelle. Logique non ? Jusque là tout va bien.
En revanche, là où le couac survient, c’est au moment de la publication des premières propositions de logo. Début décembre, Patrimoine Canada a lancé un sondage sur le site de CBC, invitant le public à voter pour déterminer l’identité visuelle des festivités. 5 logos ont été dessinés par une firme de recherche (??) dont les résultats sont pour ma part surprenants, plus proches d’un emblème d’une équipe de hockey ou d’un régiment de pompier que d’un symbole rassembleur pour un citoyen canadien. Mais comme parmi les 5 propositions, aucune n’a véritablement retenu l’attention (tu m’étonnes…), le gouvernement ouvre la décision au grand public. Résultat: un fiasco total, une profession indignée, des professionnels outrés et des pétitions en cours.
Et encore une fois, je ne comprend pas comment on en est arrivé là. Il y a tellement de designers graphiques compétents au Canada, d’agences créatives et novatrices dans ce pays, que la commande du gouvernement s’apparente plus à une parodie, qu’à une véritable envie d’aller de l’avant et de fêter cet événement.
Pour en savoir plus sur le sujet, je vous invite à lire la lettre ouverte de Philippe Lamarre (Président de la Société des Designers Graphiques du Québec) et à parcourir le site The150logo, initié par Ibraheem Youssef, où des designers nationaux ont envoyés leurs propositions.
Je suis conscient que cet article ne règlera aucun problème, mais permet au moins de se questionner sur l’importance du graphisme et sur l’évolution qu’il peut avoir. Pourquoi les institutions publiques ne font-elles pas plus confiances aux designers graphiques ? La question reste ouverte.
[…] de leur façon de procéder pour la réalisation de la communication de l’événement (cf. l’article du 19 décembre), mais je dois avouer que l’idée de fêter le graphisme en France est tout de même louable […]